holdin' all this love out here. (neven)

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@neven volyn

Les vieilles marches de l'escalier en bois de hêtre menant au dernier étage de la bâtisse familiale étaient ternes et grinçantes. Cela faisait des années que personne n'avait pris soin de les lustrer ; l'étage n'étant jamais occupé par des invités, ses grands-parents y avaient entreposés les affaires des parents de Dana. La jeune femme savait qu'un tas de sacs étaient encore entassés dans l'une des pièces abandonnées. Longtemps, elle n'avait pas eu le droit d'y accéder et lorsque son grand-père fut décédé, elle n'en avait pas eu l'envie, refusant de se replonger dans la perte de ses parents. Personne ne montait jamais au dernier étage. Jamais. Les grincements provenant du plafond ne l'avait d'abord pas préoccupée, la bâtisse était vieille et Dana n'aurait pas été surprise de trouver quelques souris dans les pièces laissées à l'abandon. Ce ne fut lorsqu'elle entendit le tintement d'affaires renversées sur le sol qu'elle se leva pour écouter plus attentivement les bruits provenant de l'étage. Quelqu'un se trouvait au dernier étage, une personne qui farfouillait de vieilles affaires. Se rapprochant de l'escalier, la jeune fae hésita ; ce n'était pas la crainte de la personne qu'elle trouverait, ça, elle en avait une vague idée. Soudain, elle se revit face à son grand-père, pleurant, quémandant le droit d'aller chercher un bracelet en or blanc orné de minuscules pendentifs en forme d'ailes, que sa mère ne quittait jamais. Le bracelet devait encore se trouver dans la vieille boîte à bijoux en bois autrefois posée en décoration sur une commode. Le pas fébrile, Dana s'aventura sur les premières marches de l'escalier, posant sa main sur la rampe poussiéreuse ; personne n'y faisait jamais le ménage. Le dernier étage avait été interdit, puis oublié. Le bois grinçait sous ses pieds, comme si les planches pouvait se casser sous son poids ou au moindre mouvement brusque. Une lueur provenait de la chambre du fond, toutes les autres portes étaient fermées - condamnées -, elle évita de regarder à droite ou à gauche et préféra s'avancer tout droit vers la présence familière qui se trouvait au bout du couloir. D'une main, elle poussa doucement la porte avant de se poster dans l’entrebâillement, observant son frère concentré sur le contenu d'une grande armoire prenant presque un pan de mur entier. La jeune fae croisa ses bras en appuyant une épaule contre le cadrage de la porte, son regard se porta rapidement vers le désordre sur le sol avant de revenir sur Neven. "Que cherches-tu ?" Demanda-t-elle d'une voix discrète.

Dana n'avait pas vu son frère depuis l'annonce de la rupture de ses fiançailles avec la Suprême de la nuit. Elle se doutait que l'événement ne serait pas sans conséquences, ni pour lui, ni pour la famille ; déjà, elle sentait quelques regards curieux se porter sur elle plus longtemps qu'à l'ordinaire. Le principal intéressé était au centre de toutes les conversations, bonnes comme mauvaises et les rumeurs commençaient déjà à vite se propager. La jeune fae n'en avait pas encore discuté avec son frère. Depuis son retour, ils s'étaient rapprochés mais les années perdues - volées - laisseraient toujours un vide et le réflexe de compter les uns sur les autres n'étaient pas si évident à apprivoiser. C'était peut-être l'endroit, comme étranger dans sa propre maison, ou les affaires de leurs parents qui les entouraient mais Dana se sentit soudainement plusieurs dizaines d'années en arrière ; naïve. "Est-ce que cela à un rapport avec la rupture de tes fiançailles ?" Questionna-t-elle, pinçant le nez d'un mouvement du visage, en s'avançant vers l'endroit où Neven se tenait encore, face à la vieille armoire. Dana ne put s'empêcher de se demander si la vieille boîte à bijoux s'y trouvait encore.

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PLAY | juillet 837 - @dana volyn

Velaris avait toujours été sa maison. Même après la mort de ses parents, même après des années dans les camps au nord de la cité, même après Taryn. Il y régnait une ambiance qu'on ne trouvait nul part ailleurs et, plus que tout, il s'y était toujours senti bien. La vie n'avait pas été rose mais il avait toujours eut la certitude qu'il avait un endroit ou rentrer, un lieu auquel se rattaché lorsque les journées se faisaient longue et le labeur se montrait particulièrement difficile. Velaris rendait l'insoutenable, soutenable. C'était sans cette ville qu'il était né, dans cette ville qu'il avait vu arrivé son frère, puis sa soeur. C'était là où il avait grandit, tant en âge qu'en mentalité, et même si certaines rues étaient teintée de la douleur de la perte, il y trouvait, généralement, d'autre lieu qui n'était que bon souvenir. Velaris était sa maison et, à bien des égards, elle prenait pleinement son sens de cité des étoiles à ses yeux. Pourtant, lorsqu'il se tamisa dans la zone nocturne prévu à cette effet, encore bouillonnant de rage et de déception, la ville ne lui était plus parue la même. Il avait déjà eut cette étrange impression lors de ses rares venues, dans l'années. Lui l'anonyme, l'hybride de l'ombre, avait l'impression d'être suivi d'un million de regards. Les choses étaient pires aujourd'hui. Aux envieux qui braquait sur lui une oeillade jalouse se joignait ceux qui avaient cru à son amourette avec Assya, ceux qui s'attristait de la fin d'un "si beau couple". Insupportable, avait un jour pesté Neven avait de s'effacer rapidement du bar où il s'était installé avec quelques membres de la caserne. Mais il n'y avait pas que les conséquence de cette nouvelle qui se répandait doucement, la ville dans son intégralité semblait teinté d'un voile grisâtre, terne et chaque lieu qui avait été son bonheur ne lui apportait, à présent, qu'une profonde lassitude.

Il avait finit par se demander si la cité lui provoquerait, à nouveau, la myriades d'émotions qu'il avait l'habitude de ressentir en se promenant dans ces rues à la nuit tombée, si au lieu du rire d'Assya, il entendrait de nouveau la voix de son père, si à la place de son toucher délicat il revivrait la main paternelle se glissant dans ses mèches noires. La rage s'était éteinte, l'agacement, lui, était toujours là. La frustration également.

C'était après plusieurs jours qu'il avait comprit qu'il ne pourrait tourner la page sans marquer une rupture brusque entre ce quotidien qui avait le sien jusque là, jusqu'à Elle. Il avait cru que rentrer dans la Nuit lui suffirait mais n'était-elle pas l'incarnation de sa cour ? La ville de son enfance n'était-elle pas modelé sur sa personne ? Aussi agaçant et déchirant fut-il, Neven avait finit par prendre contact avec le général en chef des milices nocturnes : il devait s'éloigner de la cour, s'éloigner du parfum de scandale qui le poursuivait mais il ne pouvait le faire comme il le voulait, même s'il dirigeait l'une des caserne de la ville, il ne pouvait disparaitre pendant des mois sans que cela n'ait de conséquence et il ne pouvait le faire sans autorisation préalable. Contre toute attente, on ne lui posa pas de question et Neven suspecta un certain soulagement de la part de son supérieur : depuis son retour, l'hybride était la cible de toutes les attentions ce qui rendait son travail, mais aussi celui de ses comparses militaires, particulièrement difficile. Il était rentré chez lui avec l'assurance que son congé longue durée serait tant une bénédiction pour lui que pour le reste de sa brigade : il reviendrait lorsque tout cela serait tassé, lorsqu'il ne serait plus l'objet des conversations mondaines et des ragots du commun.

Rentrer chez lui avait été plus étranges encore. Depuis son retour il avait soigneusement éviter sa maison et le reste de sa fratrie, craignant de se retrouver face à un océan de question pour lesquelles il n'avait pas de réponse, face à une pitié qu'il ne pourrait supporter. Alors, malgré l'hyptohétique soutiens qu'on lui garantissait qu'il saurait trouver auprès des siens, il était resté à la caserne. C'était ainsi qu'il avait pu supporter l'absence de Taryn, ainsi qu'il avait fait son deuil. Et, de toute évidence, cela ne fonctionnait pas cette fois. Pour autant, cela ne rendait pas son retour dans la familiarité de son chez-lui, plus agréable pour autant. Vide lorsqu'il en avait poussé les portes, la demeure portait les traces des deuils successifs et malgré le refuge qu'elle était devenu pour eux trois, eux quatre s'ils comptaient Ida, il ne pouvait s'empêcher d'y voir les fantôme du passé. Etait-ce seulement Assya ou les années d'émotions refoulées pour survivre, pour permettre à ses cadets de retrouver le foyer perdu ? Quoi que cela fut, cela lui revenait en pleine tête et ce fut d'un coup, d'un seul, qu'il se leva du canapé, s'arrachant au souvenir d'Ida lui préférant la vérité de sa naissance à celle qu'il avait créée pour elle, pour gagner l'étage. Il avait alors sorti un grand sac et s'affairait à y fourrer quelques vêtements lorsque le craquement des escaliers lui parvint. Quelques instant plus tard, la voix de Dana résonnait dans la pièce. Que pouvait-il bien lui dire, se demanda l'hybride, alors même qu'il l'avait abandonné près d'une année dans cette vieille maison, ne réapparaissant qu'en de rares occasions, dont celle ci ?  « De quoi ne pas mourir de froid dans les montagnes d'Hewn ... » répondit-il comme si son attitude était totalement normale, comme si elle était déjà au courant de tout, comme si elle savait de quoi il parlait. Il eut un soupire. « Dana ...» il ressentait un malaise palpable. Jusque là, ses cadets n'étaient qu'une idée abstraite, des visages familiers qui vivaient leurs vies loin de lui à présent. Mais dans cet encadrement de porte, elle lui apparaissait comme la fillette qu'elle avait été, pleine de question tandis qu'on les envoyait, Delyan et lui, loin de ce qui constituait leur famille.  « Difficile de passer inaperçu lorsqu'on est "le fiancé recalé".» dit-il plein d'amertume alors que la conversation lui revenait en tête. Les reproches subtilement dissimulés, le ton montant, les égos trop forts pour être muselés. Ils avaient sans doute donné au Palais des Mirages, un grand spectacle. « Je te croyais au travail ?» demanda l'ainé, quelque peu surpris de la trouver là tandis que ses souvenirs se rappelaient du calme de la maison à cette heure de la journée.

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@neven volyn

"Les montagnes d'Hewn..." répéta la jeune hybride d'une faible voix, regardant ses pieds et pinçant légèrement les lèvres. Neven avait disparu depuis presque une année, si ce n'était quelques apparitions furtives, une situation que Dana supportait difficilement - comme abandonnée -. La cadette des Volyn savait que son frère ne l'abandonnerait jamais, qu'il n'avait certainement pas le choix ou pas encore le courage d'affronter les démons du passé qui hantent Velaris. Ida était plus souvent présente dans la demeure familiale, et si elle représentait un mystère supplémentaire sur les origines des membres de leurs familles aux yeux du monde, Dana avait depuis longtemps arrêtée de poser des questions - Ida était sa sœur. Delyan était souvent aussi occupé que Neven ; si bien, que la maison semblait souvent vide. Près du manteau que tenait son aîné, la jeune Volyn attrapa un foulard en fourrure blanche détonnant avec le noir habituellement porté par les illyriens. L'étoffe qui avait appartenu à sa mère, se demandant si elle se l'était procurée lors d'une visite à la Cour de l'Hiver, écoutant d'une oreille lointaine mais attentive les paroles de son frère. "Tu pars longtemps ?" Où ? Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Souvent, elle s'était demandée ce à quoi Neven occupait son temps, ce qu'ils pensaient des soirées mondaines ou si ses pensées le menait encore vers Taryn malgré ses fiançailles - avec tristesse, ou seulement nostalgie. Parfois, elle regrettait de ne pouvoir elle-même se confier sur ses doutes, ses peurs ou simplement, de ne pas avoir l'occasion de se réunir autour d'un repas de fêtes comme une famille normale. Sauf qu'ils ne l'étaient pas. Dana était la première à garder des secrets ; son activité illégale avait longtemps été une échappatoire, sorte de rébellion contre les séquelles laissées par son grand-père. "J'ai une journée de repos." Le silence gênant qui s'ensuivit provoqua une vague de nervosité chez la jeune hybride ; elle ne put s'empêcher de triturer sa bague en saphir à son l'index de sa main droite. La journée de repos était en réalité une journée dédiée à l'organisation du transfert d'une pierre précieuse, rare, entre la Cour du Printemps et la Cour de la Nuit. Ce n'était donc pas un mensonge mais une omission de la réalité - elle se doutait que Neven n'était pas dupe même s'il n'avait jamais cherché à en savoir plus ; surtout depuis qu'il a découvert qu'elle apprenait la maîtrise du froid.

Comment est-ce que les fiançailles ont été brisées ? T'étais heureux au moins ? Et maintenant t'es heureux ? Au fond, c'est tout ce que Dana demande ; même si la situation est compliquée pour elle aussi. Putain. Neven a le sacré culot de se comporter comme si cette histoire de fiançailles à la Suprême de la Nuit ne touchait que lui, sauf que c'est le nom des Volyn qui a été entaché encore une fois et toujours pas la même famille. Elle se mordit la langue ; on croirait presque entendre son grand-père, parfois, seulement quelques fois, sur la volonté de retrouver un titre de noblesse, il avait raison. Sauf que Neven n'acceptera jamais de l'avouer. Dana le sait, ce titre perdu complique tout, en premier lieu les affaires et si le monde avait presque oublié, maintenant, ils s'en sont rappelés. Si encore elle pouvait l'aider, d'une quelconque manière... La jeune hybride a grandit au milieu des mondanités et des vautours, elle connait les jeux, elle connait les faux-semblants. Son aîné semble oublier trop souvent qu'elle n'est plus l'enfant qui a couru après ses frères pour ne pas qu'ils soient envoyés dans les camps illyriens. C'est un regard assez dur qu'elle posa finalement sur son frère. "Parfois j'ai l'impression que les mystères qui enveloppent notre famille aux yeux des autres se sont infiltrés plus profondément qu'on ne le pense au sein même de notre foyer." Quelle ironie. Ses pupilles se radoucirent sous la dureté des mots ; Dana déposa la fourrure blanche sur un coin du bureau, lâchant un soupir fatigué. Les batailles se succédaient suffisamment à l'extérieur pour ne pas ressentir le besoin de les amener jusqu'à chez eux. Un goût amer lui restait dans la gorge alors qu'elle rassemblait ses mots, ne sachant pas réellement par quel bout commencer avec ce frère qui était à la fois trop loin et pas assez près. L'ironie, sous-couvert d'humour, d'une légèreté apportée à la situation sembla être la solution préférée pour désamorcer les tensions. "Difficile de passer inaperçue lorsqu'on est la sœur du fiancé recalé, le nom des Volyn est prononcé aux quatre coins de la Cour de la Nuit." Peut-être plus loin encore. Dana afficha un doux sourire à son aîné. Les mystères entourant sa naissance protégeait la jeune fae, même si leur lien de parenté était de plus en plus connu, certains se demandait encore si elle était une sœur ou une cousine éloignée grâce ou à cause de son apparence de grande fae. Souvent, elle avait été jalouse de ses ainés, souhaitant elle aussi posséder des ailes, connaître la sensation de voler librement haut dans le ciel étoilé ; et alors, ils n'auraient pas été séparés. Depuis le décès de ses grand-parents, la jeune hybride était la dernière des Volyn à ne pas avoir l'apparence des illyriens - c'était étrange, parfois -. Si les mœurs étaient plus souple à la Cour de la Nuit, elle avait l'habitude des regards surpris à l'annonce de son nom de famille. "Je ne peux qu'imaginer à quel point la situation est difficile pour toi, Neven..." enchaina-t-elle en triturant ses doigts, réalisant que c'était la première fois depuis des années qu'elle s'adressait à son frère à cœur ouvert, osant demander qu'il s'ouvre à son tour "...mais tu as aussi une famille, qui sera toujours là pour toi." Maladroitement, la jeune hybride se rapprocha pour s'asseoir sur l'un des fauteuils recouvert de vieilles couvertures. "Alors... le plan c'est de t'en aller ?" Demanda-t-elle en pointant le manteau. "Est-ce que tu as des ennuis avec les Ozerov ?" Ce n'était pas la peur des conséquences qui étreignait Dana, c'était l'inquiétude de ce qui pourrait arriver à son frère - la volonté, le besoin, de le protéger.

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PLAY | juillet 837 - @dana volyn

Il se souvenait du jour où ils avaient été séparés. Leur père n'était mort que depuis quelques semaines et ils pleuraient encore leur mère, elle était si jeune, si fragile et il se demandait si elle se souvenait de ce jour là. Ce jour où leur grand-père était venu, ouvrant en trombe la porte d'entrée, accompagné de ces suiveurs invétérés. Le lendemain, il s'éveillait dans les montagnes surplombant Velaris, luttant pour sa vie autant que pour le respect et elle ... Il n'avait jamais retrouvé la petite fille qu'il avait laissé, bien malgré lui, à Velaris mais les années passées après son retour, les années où ils s'étaient redécouvert pour aller de l'avant ensemble, lui laissait l'amertume des conséquences que son absence avait eut sur elle. Même aujourd'hui, son regard restait douloureux à son coeur et sa décision était d'autant plus difficile à prendre qu'il ne s'agissait pas là d'un devoir de représentation, mais d'une préparation à un exil moins avouable. « A Hewn ? Quelques jours tout au plus. Je pensais aller rendre visite à Darya à Menelmorn ensuite, histoire de voir les petites ...» dit-il, évitant soigneusement la question réelle qui se cachait derrière les mots de Dana. Il ne comptait pas apparaitre à la saison mondaine, et il voulait profiter de l'absence de la noblesse pour établir un plan d'attaque, un plan qui lui assurerait d'être prêt quand, après le bal qui désignerait la cour régente, tous rentreraient pour l'hiver. Il ne voulait pas être là quand ça arriverait, il les laisserait jaser dans leur coin, il laisserait Assya se trouver un nouveau prétendant qu'elle contrôlerait plus aisément, il laisserait la vie poursuivre son cours et reviendrait lorsqu'il serait capable d'y faire face. Oui, c'était un bon plan. Un bon plan qui ne tenait, et il s'en rendait compte à présent, aucunement compte de ses cadets.

Il retint un soupire tandis que le nom sonnait à ses oreilles avec la violence de la trahison. Il revoyait Assya sourire, accoudé à son balcon, il entendait son rire tandis qu'il la serrait contre lui, il revivait l'éclat de fierté de la voir si acharnée à découvrir la vérité. «Avec lequel des Ozerov ?» demanda-t-il l'air de rien, jouant sur les relations étrange qu'il entretenait avec le jumeau de son ex-fiancé. Finalement, il aurait préféré passer la journée avec Ilya Ozerov que d'imaginer se retrouver seul dans une pièce avec Assya. Cela n'aurait pas du être, cela aurait du lui faire ni chaud ni froid, cela n'aurait du rien du être. Et pourtant, il lui semblait encore sentir la douceur de sa peau sous ses doigts, la voir jouer avec le pendentif de Merzost qui lui avait offert la suprématie, l'écouter raconter des choses qu'elle n'avait dit à un autre. Elle était devenue plus que la place qu'il avait voulu lui donner et il se détestait pour cela. Neven eut un soupire : aujourd'hui encore c'était par elle qu'il prenait ses décisions, abandonnant les siens, la ville qu'il aimait tant, les amis qu'il avait, son poste à la caserne pour la fuir, elle. Ils avaient été un jeu, et elle avait gagné. Et il était très mauvais perdant. «J'aurais aimé que les choses soient différentes. Depuis le début. Si j'avais pu faire quelque chose, tu n'aurai jamais été seule avec Eux, j'aurais vu que tout ça ne menait à rien, j'aurais pu ...» dit-il, la culpabilité de son départ prochain se mêlant à tous les manquements d'aîné qu'il avait commis depuis leur jeune enfance. Il s'était vu en contrôle, persuadé que son rôle d'éole de Stormvaengir, que sa fonction de chef des espions lui permettait de connaitre les cartes de chacun et il s'était fait avoir par celles se trouvant dans sa propre main. Ses lèvres se pincèrent tandis que l'écho de son calvaire résonnait dans la vie de Dana. Depuis ses fiançailles, le nom de Volyn était revenu sur le devant de la scène, un nom trop longtemps oublié qui apportait, dans son sillage, un vent de scandale mais la promesse d'histoire croustillante. Les ragots avaient fait choux gras de son histoire avec Assya : La petite fille du Suprême qui avait déchu les Volyn offrant sa main au descendant de l'homme que son aïeul avait si durement puni. Et maintenant, tous voulaient comprendre. Qui était à l'initiative de la rupture ? Avait-il fait quelque chose pour s'attirer les foudres de l'Ozerov ? Avait-elle prit conscience du mauvais choix qu'elle avait fait en choisissant un homme d'une famille aussi controversée ? Il avait vu les effets que cela avait eut sur lui, mais n'avait jamais songé à la manière dont cela rebondissait sur le reste de la famille. «Peut être est-ce une bonne chose que je m'éloigne quelques temps. Tu as déjà bien trop souffert à cause des hommes de cette famille.» souffla-t-til songeant au Patriarche et à tout ce qu'il avait imposé à sa cadette avant qu'il ne revienne la chercher. Après une hésitation, Neven finit par avouer le projet à long terme qu'il pensait mettre en pratique une fois le rituel de régence passé. «On m'a proposé de partir quelque temps à Adriata. Si Assya n'est pas reconduite dans son rôle de Haute-Suprême, rester ici ... Je ne pourrais pas.» Imaginer la côtoyer jour après jour, avoir conscience de son regard, ou de l'absence de ce regard, sur sa personne lorsqu'elle passerait à la caserne, faire comme s'il n'y avait jamais rien eut entre eux alors qu'ils avaient joué la comédie du parfait petit couple pendant un an, cela était peut être trop lui demander. Il ne pourrait pas. Il devait guérir d'elle s'il voulait retrouver la pleine possession de ses moyens. Il devait guérir d'elle s'il voulait redevenir l'éole, le capitaine, le nocturne qu'il avait été.

Il finit par abandonner la penderie, s'asseyant là où il le pouvait entre les amas de vêtement qu'il en avait sorti. Il n'avait jamais expliqué ce qu'il s'était passé, et il n'était pas certain de le pouvoir plus à sa soeur qu'à un autre nocturne qui n'était aps au courant de son implication dans la guilde. Assya savait. Elle savait qu'il était l'un des quatre, l'un des décisionnaire de cette organisation violente qui avait commandité Beltane, qui était, d'une manière ou d'une autre, complice du décès de Liao Ayako. Elle savait et pourtant, elle n'avait rien dit. Il s'était félicité de lui avoir montrer la vraie et hideuse nature du monde loin des frontières de la Nuit. Et puis il y avait eut les chuchotements, les rapports de fantôme teinté de malaise. Et elle qui, jusque là, était si pure, si fragile, si princesse à protéger revêtait un masque qu'il ne lui connaissait pas. Ce n'était plus la Assya qui avait partagé son lit, prit son bras au réception, cherché à comprendre pourquoi les Stormvaengir s'attaquait de manière si virulente aux faes. C'était devenu la Suprême, l'incarnation du pouvoir jusque dans ses pires démonstrations. Elle n'était plus pure et lumineuse telle une étoile, elle manipulait sans remord dans l'obscurité de la nuit. Il s'était sentit trahi, il était parti. «Je me suis perdu Dana. Je pensais qu'après Taryn, je ne pourrais plus trouver une telle affection pour une autre et quand Elle m'a proposé ce mariage, nous étions d'accord que ce ne serait que politique.» C'était ce qu'elle avait proposé : elle avait besoin d'un homme prouvant sa volonté d'ouverture envers les ailés, elle avait besoin de son nom, de sa noblesse, même perdu, de son obéissance. Et en échange, elle lui offrait la sécurité des siens, l'assurance que le nom de Volyn ne serait plus associé aux basses actions du Patriarche et, sans s'en rendre compte, elle lui donnait accès à son oreille. Il avait pensé que, par elle, il ferait comprendre la souffrance des hybrides et illyrien, qu'il ferait d'elle l'ambassadrice de leurs causes, que par elle, ils obtiendraient le pardon pour leurs actes. Et maintenant il était loin de tout cela, broyant du noir dans son coin tout en ruminant ce qu'il n'avait pas su voir. « Il semblerait que j'en attendais trop ...» finit-il par dire, incapable de dire à Dana ce qu'il avait entendu, ce qu'il avait  découvert sur elle. Elle demeurait une nocturne, elle devait pouvoir se raccrocher au plus brillant des astres de leur cour, même si lui ne le pouvait plus. Il laissa passer un instant, songeant à l'invitation de certaines vieilles connaissances qu'il devait réfléchir, et possiblement envisager. « On dit que les plages d'Adriata sont les plus belles du continent. Tu pourrais venir avec moi si cela te dit. Ce n'est que quelques temps, assez pour me faire oublier, assez pour être capable de regarder la Maison du Vent sans avoir de ressentiment.» Il ignorait combien de temps cela durerait, mais s'il ne voulait imposer son exil à personne d'autre qu'à lui, il ne supportait pas l'idée de la blesser par son départ.

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@neven volyn

Dana haussa les sourcils à la plaisanterie de son frère, comme l’Ozerov en question n’était pas une évidence. Qu’il rende visite à Darya pour passer du temps avec elle et ses enfants était normal, elle était sa meilleure amie ; même si les relations entre le mari de Darya et Neven n’était pas toujours amicale, ce n’était pas Ilya qui mettait son frère dans cet état. Ce ne pouvait être qu’une seule personne : Assya Ozerov. Dana respectait suffisamment l’intimité de son aîné pour ne pas forcer une discussion qu’il n’aurait pas envie d’avoir. Certes, elle avait posé une question, qui n’obligeait pas à une réponse. La Volyn tiqua à l’explication de Neven, qui impliquait plus que sa relation avec Assya, qui mentionnait à demi-mots le passé et l’éloignement dont ils avaient été victimes. Si Dana reprochait parfois à Neven d’être souvent absent, elle ne lui en avait jamais voulu pour ses années dans les camps illyriens. Ce n’était pas sa faute, la vie en avait décidé ainsi dès le décès de leurs parents. Tous trois étant des enfants à l’époque, ils n’auraient jamais pu tenir tête à leurs grands-parents, aussi un sourire léger s’installa sur le visage de la nocturne. Doucement, elle porta sa main sur le bras de son aîné, apportant une poigne réconfortante. « Tu n’aurais rien pu faire. » Affirma-t-elle d’une voix ferme. « Tu n’aurais pas plus eu les moyens de tenir tête à grand-père que de savoir l’issu de ces fiançailles, Neven. Lorsqu’on a été séparés, nous n’étions tous que des enfants. Il ne vous aurait jamais gardé ici Delyan et toi, et moi, je n’aurai jamais pu vous suivre dans les camps illyriens. » Dana soupira face à la triste vérité, qu’elle aurait souhaité autrement. « De la même manière, tu n’aurais jamais pu savoir que les fiançailles seraient rompues. Même si ça avait été le cas, ça aurait été très délicat de refuser la main d’Assya ; à l’époque, c’était le meilleur choix pour tout un tas de raisons. » Pour l’avancée dans le traitement des illyriens et des hybrides, pour les Volyn. La nocturne retira sa main restée sur le bras de son frère en signe de réconfort ; elle aimerait lui faire comprendre à quel point il avait déjà fait suffisamment, qu’il ne pouvait pas toujours tout contrôler ou réussir. Dana savait que les répercussions des actes de Neven sur la famille était difficile à supporter pour lui ; aussi, elle se mordit la langue de ne pas lui avoir parlé plus gentiment. Mais alors, peut-être qu’il ne serait jamais ouvert à elle, c’était toujours le plus compliqué entre eux : communiquer correctement. Elle haussa les sourcils en comprenant son plan, un creux se formant dans son estomac au fur et à mesure qu’elle écoutait. La Cour de l’été… Quelques temps… Combien de temps ? Peut-être qu’il n’en savait rien, tout dépendrait de l’élection ou du temps que mettrait les gens à se lasser des rumeurs qui couraient au sujet de la rupture des fiançailles.

« Je t’interdis de te comparer à grand-père. » Le seul homme de cette maison à l’avoir fait souffrir c’était leur grand-père, certainement pas Neven. L’idée du départ de son aîné lui serrait le cœur ; elle avait l’impression de revenir à ce jour où elle avait hurlé et supplié de toutes ses forces leurs grands-parents pour qu’ils n’envoient pas ses frères dans les camps illyriens. « Lui, aurait pu partir à l’autre bout d’Evanor, ça aurait été une bénédiction. » Sur un autre continent si cela avait pu être possible. « Peu importe ce que tout le monde raconte, je m’en fous. Est-ce que ça m’énerve d’entendre le nom des Volyn dans mon dos ? Oui, clairement. Mais tu sais ce qui est douloureux ? Tes absences. Je suis heureuse quand tu es à Velaris. J’aimerais juste… qu’on arrive à se parler plus souvent. Mieux. Je ne sais pas… j’ai besoin de toi. Parfois, j’aimerais avoir l’impression que tu as besoin de moi aussi. » Ses joues étaient légèrement rosées, parce qu’elle n’avait pas l’habitude d’être aussi ouverte avec son frère. Les non-dits commençaient à être lourds à supporter et Dana avait décidé de crever l’abcès. « Je ne suis plus une enfant. Je peux te protéger, moi aussi. » Même si elle ne voyait pas bien ce qu’elle pourrait faire au sujet des fiançailles, et qu’il était bien meilleur combattant, mais elle avait certainement des atouts, et surement, elle était capable de réconforter son frère lorsqu’il avait une peine de cœur. Aussi, parfois, elle se demandait si ses silences ne cachaient pas autre chose ; tout comme les siens. En réfléchissant bien, son aîné n’était pas au courant de ses activités dans la Guilde mais il connaissait son métier donc c’était peut-être un demi-mensonge, parce que les deux étaient extrêmement liés. Cependant, il ne savait pas non plus pour le cabaret ; peut-être qu’elle n’était pas obligée de révéler à son frère ses anciennes activités de danseuse, quoique parfois elle y retournait le temps d’une soirée. Autant elle n’avait pas honte, autant c’était son frère ; Dana pinça les lèvres, l’envie de rire et de gêne mélangée face à la réaction qu’il pourrait avoir. Non, elle ne dirait rien aujourd’hui et elle espérait qu’aucune de ses connaissances de l’avait vu danser au cabaret. C’est la mention de Taryn qui fit relever la tête de Dana brusquement, effaçant instantanément son sourire. Elle ne s’était jamais pardonnée de ne pas avoir fait venir Neven plus tôt ce jour-là. L’éloignement de son aîné pour être près d’Assya avait été un soulagement dans un sens, parce que Dana s’était dit que peut-être il arriverait à aimer de nouveau. La jeune nocturne sentit une boule se former dans sa gorge et elle se força à ne pas pleurer face aux aveux de son frère. Il se confiait à elle. Il se confiait sur ses relations. Sur ses sentiments. « C’est une idiote. » Aussi, elle aurait presque eu envie de se mordre la langue de parler ainsi de sa Suprême, mais peu importe, ce serait toujours sa famille qu’elle défendrait. « Tu avais le droit de vouloir plus que de la politique pour ton mariage. Je sais comment ça fonctionne, je ne suis pas naïve ; grand-père, il t’aurait dit que c’est toi l’idiot. » Dit-elle un sourire narquois sur le visage. « Tu as déjà tellement souffert… être encore capable de t’ouvrir, ça montre que tu es droit, courageux et loyal. Neven, ne te fermes pas ; tu mérites plus. » Dit-elle doucement à son aîné. « Tu mérites ce que nos parents avaient. » Un véritable lien d’amour. Ses pensées s’envolèrent vers Taryn. « Je suis désolée. » Ajouta-t-elle la voix cassante sous l’émotion ; il fallait qu’elle lui dise. « J’aurais dû t’appeler plus tôt ce jour-là. J’ai écouté Taryn mais j’aurais dû… Peut-être que tout serait différent. » Dana ne regardait plus Neven, elle tripotait ses ongles avec anxiété.

Venir avec lui ? C’était tentant. Elle aurait aimé dire oui. Elle pourrait dire oui. La nocturne n’était pas contre passer du temps avec son aîné ; c’était l’occasion de rattraper le temps perdu, de passer du temps avec lui au quotidien. Cette opportunité ne se présenterait plus le jour où il reprendre ses fonctions. Peut-être pourrait-elle en profiter pour développer les liens les galeries de la Cour de l’Eté et de la Nuit ? Sauf qu’elle devait rester près de l’entrepôt pour protéger les œuvres de la Guilde ; elle s’absenter déjà plusieurs fois par mois pour se rendre à Elysium… Dana soupira, il lui était difficile de prendre une décision. Le choix entre prendre quelques temps de repos pour être avec son frère et continuer ses devoirs pour la Guilde n’était pas simple. « L’une de mes plus proches amies vient d’Adriata, Néréis Taellim. Si tu la croises, tu lui passeras le bonjour ? » Dit-elle pour détendre l’atmosphère ; elle se rendit compte que c’était l’une des premières fois depuis longtemps qu’elle se confiait à son frère sur sa vie privée. Ils parlaient rarement de leurs relations ou de leurs activités. « Ton invitation est tentante. » Avoua-t-elle en réfléchissant. « J’ai quelques… affaires, qui me retiennent souvent à Velaris. Je suppose que si j’arrive à m’organiser, comme lorsque je me rends à Elysium, je pourrais te rendre visite. » Dit-elle d’une voix enjouée. « Peut-être même que je pourrais passer un plus long séjour avec toi si je m’y prends suffisamment à l’avance… Comme tu l’as dit, Adriata est magnifique. Si tu veux bien ? » Est-ce qu’elle pourrait s’arranger pour prendre deux ou trois semaines ? Elle y réfléchirait, pour son frère, elle trouverait. L’idée de séjourner quelques temps à Adriata avec son aîné rendait l’idée de son départ moins douloureuse ; elle espérait que ce serait possible. Au mot ressentiment, Dana réalisa que son frère avait été très vague dans ses mots. « Qu’entends-tu par le fait que tu te sois perdu ? Tu veux dire, qu’Assya n’était pas celle que tu avais imaginé ou que tu as développé des sentiments non partagés ? » Demanda-t-elle curieuse.

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PLAY | juillet 837 - @dana volyn

Il avait le sentiment que leur vie n'était qu'une suite de grands bonheurs et de grands malheurs qui se répétaient encore et encore : était-ce un signe de la déesse, un message qu'ils se refusaient à entendre ? Il avait tant de souvenir dans cette maison, tant de joie et de peine qui s'étaient succédés tandis qu'aux pleurs des bébés succédaient les rires des enfants et le silence du vide. Lorsqu'ils étaient revenus, les enfants étaient devenus des adultes et une nouvelle ambiance s'était installée entre ces murs. Mais malgré les amis, malgré les passions et les occupations, il demeurait des blessures qui demeuraient présentes, béantes et les fantômes du passé ne les quittaient jamais vraiment. «Ne crois-tu pas que, quelque part, nous avons été maudit ? La disparition de nos parents ... L'absence de disparition de notre grand-père ... Les camps... Taryn ...» La peine de Neven était souvent empreinte d'une rage profonde, d'un sentiment d'injustice que le jeune homme impuissant qu'il avait été ne parvenait à oublier. Les trémolos de sa voix rencontraient par moment le sifflement d'une colère trop longtemps refoulée surtout lorsqu'elle rencontrait le souvenir de leur grand-père. Dana était sans doute trop jeune pour se souvenir des disputes incessantes entre leur grand-père et son fils, des insultes étouffées par les murs de la maison et par les mains protectrices de leur mère sur leurs oreilles. Mais Neven, lui, se souvenait de cette étrange sensation qui suivait les visites de cet invisible grand-père : la nervosité de Tomas Volyn tandis qu'il affichait un air aussi naturel que son agacement lui permettait d'avoir. «Pendant un temps, j'ai cru qu'Il était le responsable de tous nos malheurs et que ses positions expliquait que le destin s'acharne sur nous tous pour nous faire expier ses idées à la con ...» D'aucun aurait pu dire qu'il s'agissait d'un coup du sort de voir des hybrides nocturnes naitre dans l'une des rares familles qui leur était si ouvertement hostiles dans la Cour. Jamais Meiri n'en avait rien dit, elle pour qui l'acclimatation loin des camps, loin des ailés, loin de la bienveillance d'une famille devait être plus compliqué que jamais. On sous-estimait souvent la retenue des illyriens face au mélange des sangs : même chez les nocturnes, vivre en relative harmonie ne signifiait pas être encouragé à se reproduire avec son voisin. Neven avait cassé assez de nez au clan de Velaris pour pouvoir en témoigner. Mais avec la fin de sa formation martiale et son retour dans la demeure familiale, il avait espéré que les choses aient changé. Risible. Dans leur longue existence, les faes ne se remettaient jamais en question : malgré tout le temps du monde, ils restaient égaux à eux même, persuadés de la justesse de leurs jugements et de l'absolue vérité de leurs croyances. A défaut d'être accueilli comme le petit fils qu'il était, Neven avait espéré qu'ils s'ignoreraient royalement mais il semblait que porter le nom de Volyn, tout aussi déchu fut-il, n'attirait que des ennuis. Finalement, l'annonce du décès des doyens de la famille apporta son lot de soulagement ... Pour un temps. «Tss, même dans la mort il continue de m'emmerder celui là.» Car il aurait fallut être aveugle et sourd pour ne pas voir que certaines des réserves qui avaient été émises lors de ses fiançailles avec Assya tenait plus dans son nom que dans la paire d'ailes sombres qu'il avait dans le dos. Il n'osait pas demander à Dana si cela la poursuivait également mais ne doutait pas que Delyan sentent le frein que ces cinq lettres apportaient à ses recherches. Alors, quand il voyait que le grabuge de ses choix amenaient dans la vie de sa fratrie, il ne pouvait s'empêcher de voir le parallèle évident entre lui et le patriarche. Sa main vint caresser les mèches brunes de Dana. Il voulait avoir le courage de faire ce que leur aïeul n'avait jamais fait, de pouvoir prendre la distance de réfléchir, de leur laisser la possibilité de ne pas souffrir des conséquences de ses actes et de les assumer seul.

Cependant, si le discours de Dana résonnait entre les murs de la chambre, rappelant les différence qui existaient entre sa vision des choses et la réalité de ce qu'elle apercevait, seul lui venait à l'esprit qu'elle avait sans doute grandie plus vite qu'il ne l'aurait voulu. Il lui adressa cependant un sourire, amusé de se voir dépossédé de son rôle de frère aîné pour l'imaginer défendre sa vertu avec ferveur. Mais l'amusement disparu lorsque le plaidoyer de Dana le ramena, des années en arrière, à Taryn. C'était sa faute, il avait amené le prénom dans la conversation sans mesurer les souffrances que le souvenir de l'illyrienne apportait dans son sillage, des douleurs dont il n'était pas le seul destinataire. «Ne me dis pas que ça te travaille depuis tout ce temps ?» demanda l'aîné, l'inquiétude de son regard balayant la figure de sa cadette. Il avait tendance à oublier qu'elle avait été là, qu'elle avait été seule, qu'elle avait du lui annoncer et qu'à son rôle de funeste messagère, elle devait aussi vivre ce nouveau deuil. La peine n'était la même mais Taryn avait été importante pour eux, un membre à part entière de la famille quoi qu'elle fut la seule à ne pas porter leur nom. Des rires qui avaient peuplé de nouveau la vieille maison, ceux de Taryn résonnaient en écho fantomatique dans son esprit mais il n'était pas le seul que son absence peinait. Il retint un soupire, il n'avait pas sut être à l'écoute, il n'avait pas sut voir. «Dana ... Tu n'aurais rien pu faire de plus tu sais. Elle était ... Incroyablement bornée et tu n'aurais jamais pu la faire changer d'avis. On ne refait pas le passé : je ne pourrais pas effacer ce que le vieux a fait après la mort de nos parents et te flageller ne ramènera pas Taryn.» lui dit-il, ses mains s'accrochant doucement aux épaules de la jeune femme. S'il avait apprit une chose, c'était que laisser partir ces moments ne voulait pas dire les renier et qu'aller de l'avant ne signifiait pas oublier. «Ma consolation c'est de savoir qu'elle n'était pas seule dans ces derniers moments, même si ce n'était pas avec moi. » ajouta-t-il en un pudique remerciement. Le passé ne pouvait que rester où il était, c'était à eux d'avancer avec les leçons qu'ils en retenaient.

Ainsi la perspective de son installation à Adriata semblait une perspective plus réjouissante, une forme de pas vers l'avenir qu'il se devait de faire pour ne pas se noyer dans ses affection perdues. Taryn, Assya, ... Il ne pourrait jamais changer et grandir s'il restait englué dans sa propre histoire, s'il demeurait prisonnier de ses souvenirs. Finalement, partir pour l'Eté était peut être l'occasion d'une page se tournant : cela lui donnerait le temps de faire le vide, de faire oublier, d'oublier lui même, ou cela serait le point de départ d'une nouvelle vie. Dans ce monde plein de possibilités naissaient de nouveaux espoirs, de nouvelles amitiés, et peut être la lumière au bout du tunnel. «Bien sur, de toute façon même si je te disais de pas venir, tu le ferais quand même. Veille quand même à ce que Delyan prenne des douches ou t'auras vite l'impression de vivre avec un opossum.» dit-il avec un humour, taquinant le puiné de la famille qui, pris dans ses amours pour l'ingénierie en oubliait parfois le monde réel. Il finissait d'empaqueter ses affaire, l'ame plus légère lorsque la question de la jeune fille l'arrêta. Prenant un instant pour réfléchir, il demeura silencieux. Quelles avaient été ses attentes au sujet d'Assya ? Quand s'était-il intéressé sincèrement à elle ? Quand est-ce qu'il avait basculé ? «C'est justement toute la question ...» finit il par répondre, énigmatique.

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@neven volyn

Maudit ? La question avait effleuré son esprit plus d’une fois. La déchéance de leur famille s’était étendue pendant plusieurs décennies. Dana ne saurait dire si leur génération était celle qui avait le plus souffert. Dès l’enfance, on leur avait arraché tellement. Une mère, morte en couche. Un père, sauvagement assassiné dans les rues de Velaris. La séparation forcée de la fratrie pendant de nombreuses années. Au décès de leur grand-père, ils avaient cru apercevoir la lumière du bonheur. Ce fut de courte durée, car Taryn s’en était allée, elle aussi, emportant l’enfant à naître. Une boule se forma dans la gorge de la nocturne. Un souffle léger s’échappa de ses lippes en même temps qu’elle secouait la tête. « Grand-père était certainement la cause de certains de nos malheurs. » L’assurance se fait entendre dans la voix. Un rire s’ensuivit, aussi léger qu’ironique. Le vieux ne cesserait jamais de les poursuivre, son attitude avait marqué les trois enfants pour toujours, chacun s’en sortait comme il le pouvait. Dana pinça les lèvres en observant son aîné. « Je ne crois pas que nous sommes maudits. » Elle ne sut dire d’où lui vint son élan d’espérance, une éclaircie dans cette noirceur. La nocturne avait toujours été douée pour voir le verre à moitié plein. Un air doux s’afficha sur son visage quand son frère vint lui caresser quelques mèches brunes. « Ta carrière militaire est un succès. Delyan adore son travail d’ingénieur. Je suis plutôt douée en tant que marchande d’art. Idalina aussi, y trouve son compte. » La brune attrape un vieux vêtement poussiéreux qui appartenait à leur mère, l’observant quelques instants. Les yeux de Dana se relève vers son frère. « On est plutôt heureux tous les quatre. Le nom des Volyn nous suivra où qu’on aille et quoique l’on fasse, mais il me semble que chacun d’entre nous a réussi à tirer son épingle du jeu et à s’en accommoder. » Ils ne pourraient pas refaire le passé. Dans sa jeunesse, Dana s’était terrée dans sa colère ; un sentiment d’injustice, égoïste. Ses yeux étaient restés fermés longtemps avant de s’ouvrir au monde. Lorsque Neven était revenu à Velaris, tenant tête à Tomas Volyn, la nocturne avait profité d’une liberté soudaine, la laissant démunie face à sa propre vie. Jusqu’à ce jour, leur grand-père avait pris toutes les décisions et soudainement, elle s’était retrouvée libre de ses idées et de ses choix. Ayant toujours aimé danser, son premier acte de rébellion avait été d’intégrer le cabaret le Soleil de Minuit. Dana avait fait la rencontre des danseuses, abîmées par ce monde qui les avait oppressés, parfois mutilées. La nocturne avait ouvert les yeux sur toutes les autres injustices, jugeant la sienne plus légère et sa colère s’était calmée. Si les tensions étaient encore palpables par moment, la Volyn avait accepté le passé familial, transformant tous ses sentiments négatifs en forces.

Les regrets étaient restés enfouis chez Dana pendant de nombreuses années. C’était peut-être la situation difficile qu’ils traversaient depuis la rupture des fiançailles, ou l’ambiance de cette vieille chambre mais la nocturne trouva le courage de dire les mots longtemps dissimulés à son aîné. Face à la question qu’il lui posa, elle se sentit démunie. Oui, ça l’avait travaillé tout ce temps. Dana entrouvrit la bouche, elle hésita un instant. Une moue s’afficha sur le visage de la brune, qui ne répondit rien et les paroles de Neven réchauffèrent son cœur. Un nœud se dénoua dans sa poitrine et l’hybride essuya une ou deux larmes qui perlèrent au coin de ses yeux. Ils ne pourraient pas refaire le passé, c’était exactement ce qu’elle avait pensé quelques instants plus tôt. Son frère n’était ni déçu ni énervé. Au contraire, sa consolation était de savoir que Dana avait été en présence de Taryn dans les derniers moments. L’opposé de toute ce pourquoi la brune s’était flagellée toutes ses années. « Je… En réalité, oui. J’ai toujours pensé que… tu avais tous les droits d’être déçu ou énervé contre moi. » La pression qu’elle relâchait était si immense qu’elle pourrait en défaillir, mais Dana garda la tête haute parce que si son frère ne s’effondrait pas, alors elle n’en avait pas le droit. De tous, c’était lui qui avait ressenti la douleur la plus vive, la perte la plus immense. « Merci Nev’… » Dit-elle simplement, avant de le prendre dans ses bras, d’une étreinte aussi puissante qu’elle le pouvait. Dana ne savait pas combien de minutes s’écoulèrent mais lorsqu’elle le relâcha, son cœur était plus léger.

L’année à venir ouvrirait de nouvelles perspectives, à commencer par des vacances à Adriata en famille. Un rire joyeux s’échappa des lèvres de la Volyn. « Peut-être que je réussirai à le convaincre de venir passer quelques jours avec nous. Pour le reste, je n’en prends aucune responsabilité, c’est déjà un miracle quand Delyan sorte de son atelier pour prendre un repas correct ! » Le ton était à l’humour même si une part de vérité se cachait dans ses paroles. Delyan avait trouvé une véritable passion dans l’ingénierie et Dana était heureuse de le voir s’épanouir même s’il en oubliait souvent sa vie en dehors du travail. La nocturne reposa le vêtement de leur mère dans un coin avant de prendre un sac de l’armoire qui faisait face à Neven. « Puisque tu remets le nez dans d’anciennes affaires, je vais te tenir compagnie. Il y a longtemps qu’on aurait dû faire un tri et se débarrasser d’un tas de vieilleries. » L’annonce laissa place aux gestes, Dana attrapa une vieille pochette au cuir déchiré, qui partirait directement dans une collecte de dons. Avec quelques rafistolages, certaines affaires seraient appréciées. Observant son frère du coin de l’œil, la nocturne profita d’un de ces rares moments de complicité pour le questionner sur la rupture de ses fiançailles. Dana était si curieuse de la vie de son frère ; des secrets qu’il cachait. Oh, elle ne souhaitait pas tout savoir respectant son jardin secret. Mais elle avait toujours eu ce sentiment, qu’il dissimulait souvent des choses plus profondes et importantes. « Quand même, pour rompre des fiançailles… La dispute a dû être forte. » Mentionna-t-elle, rapidement, d’un air innocent qui ne l’était pas tant que ça. « Ilya a épousé Darya, qui est une hybride ailée, même si c’était par amour... C’est un message fort qui a été envoyé. » De leur union, sont nées deux petites hybrides adorables, les premières à naître dans une famille seigneuriale d’une union légitime. « Assya annonçait vos fiançailles en même temps ! Puis, Merrill est devenu baron. » Un soupir s’échappa des lippes de sa sœur. « Enfin, ce que je veux dire, c’est que le tableau paraissait annonciateur de changements. La Cour de la Nuit était sur le point de marquer un tournant dans l’histoire et ça aurait pu profiter à tous ceux qui sont rejetés… au moins, à améliorer la condition des hybrides et des illyriens sur le long terme. » Ses yeux se fixèrent sérieusement sur son frère. « Je n’ai jamais réellement osé en discuter avec Assya mais… lorsqu’on se fréquentait, les mois où vous étiez fiancés, elle avait l’air… profondément attachée à cette cause. Je pensais que ce côté d’elle te plaisait… Ou peut-être que tout n’était pas si parfait à l’intérieur ? Est-ce que tu as entendu des choses qui t’ont… énervé ? » Ajouta-t-elle en haussant les épaules, l’air de rien. Dana pouvait être une véritable fouine si elle le souhaitait mais ce qu’elle aimerait surtout, c’était comprendre son frère. « Oh, tu sais, ce qui est important pour moi, c’est que tu sois heureux. » Un mariage d’amour, c’était tout ce que Dana souhaitait pour Neven. « Il y a certainement d’autres moyens de se battre, d’apporter du changement. » Le ton devenait pensif. Dana savait que son activité à la guilde n’avait rien de noble, elle faisait du recel d’œuvres d’art mais plus d’une fois, elle s’était demandé si ses compétences pourraient être utiles dans un autre contexte. Son frère, avec son poste haut gradé et la position qu’il avait eu auprès d’Assya, avait certainement plus de pouvoirs. « On se demande si nous ne sommes pas maudits… mais que faisons-nous ? J’en ai marre de me plaindre. Je crois que j’aimerais avoir la possibilité d’agir. » Les prunelles qu’elle posait sur son frère se firent plus intenses. « J’avais supposé, qu’en acceptant les fiançailles, c’était aussi ton idée. Tous les événements qui se sont enchainés ces derniers mois… Tout a basculé si soudainement. Tu dis que tu t’es perdu Neven… Mais c’est étrange. Dans quoi ? Comment ? » Le silence s’installa entre les deux Volyn. Dana attendait des réponses, qu’elle n’aurait peut-être pas.