Turn the pain into power — Kora | Dana | Louve | Yseult

Kora n’en pouvait plus d’attendre.

Elle a beaucoup épaulé Tori dans son entreprise, sans pour autant qu’elle n’en découvre trop. Ces dernières semaines, les deux ailées ne faisaient que de parler de la Maison Awoshan. Avec le décès du maître de l’illyrienne, les choses se sont débloquées pour elle et Tori a enfin pu se lancer dans un projet qui lui tenait à coeur. Durant toute cette période, Kora a vu son amie renaître, trouver une véritable raison d’être. Elle a travaillé d’arrache-pied sans pour autant abandonner le cabaret; elle a honoré ses devoirs jusqu’au bout des ongles, multipliant les déplacements jusqu’à Mirghlin, mais revenant toujours à temps pour ses représentations.

Quand Tori a annoncé l’ouverture prochaine de la Maison, elle a invité les sirènes à une soirée découverte. Si certaines étaient plus partantes que d’autres, Kora remercie encore celles qui se sont sacrifiées… Car elle n’avait aucune envie de manquer cette opportunité. Certes, cette invitation reposait au sein à l’Aube - cour qu’elle s’était juré d’éviter autant que possible depuis son séjour dans les laboratoires - mais elle ne pouvait pas manquer cette soirée mémorable. Après tout le travail qu’avait fourni son amie, toute l’aide qu’elle lui avait fournie, ça lui paraissait dans l’ordre des choses d’être présente ce soir.

Elle avait choisi une ravissante robe moulante, courte et au haut transparent, ne couvrant que quelques parcelles de son buste par des sortes de filaments sombres. Quel plaisir de franchir les portes de cette maison de passe en compagnie de ses si belles créatures, et amies, accessoirement. Sa très chère Yseult, aux côtés de Dana et même Louve, qui a accepté de venir elle aussi malgré les souvenirs traumatiques que représentent l’Aube. Elle n’avait pas eu le choix que d’accepter, Kora a trouvé tous les bons arguments pour la rassurer.
Dès leurs premiers pas dans l’impressionnante demeure, les prunelles de la Diurne s’illuminent. Tori n’a pas ménagé ses efforts ni les artisans; les décorations sont sublimes. Elle a l’impression d’être aussitôt transportée dans un nouvel univers.

Les représentantes d’Elysium s’installent à une table qui leur est réservée au milieu des autres convives. Kora est ravie de découvrir qu’on les attend avec un cadeau personnalisé pour chacune, délivré par une jolie jeune fille plutôt réservée. Ca n’empêche pas la cabaretière d’être fortement intéressée par le contenu de la boîte qu’elle ne tarde pas à ouvrir. ”Tori sait nous recevoir”, relève-t-elle tout sourire tandis que ses doigts tirent sur le noeud. Le couvercle retiré, son regard ébahi découvre le kimono de soie noire aux finitions sublimes. Kora s’imagine déjà se pavaner dans les couloirs du cabaret avec cette nouvelle tenue.
Elle n’a pas le temps de lorgner sur les kimonos de ses amies que les lumières se tamisent et le spectacle commence. Trois artistes font leur entrée sur scène, chacune est plus ravissante que la précédente. Pendant que l’une ensorcelle le public de son chant, la seconde l’accompagne en musique et la troisième virevolte sur scène dans une valse de soieries. Une danse aérienne et légère qui donne aux spectateurs un magnifique avant-goût des prestations de la Maison Awoshan, un lieu dont l’importance résonne profondément en Kora, puisqu’elle fait curieusement écho au Soleil de Minuit qui accueille lui aussi des âmes en leur offrant une deuxième chance dans la vie.
Tori vient finalement se joindre à la danse et comme rarement dans son quotidien, Kora se laisse aller à l’éblouissement. Elle n’est pas au cabaret où elle doit veiller à son bon fonctionnement, à scruter les pas de ses danseuses en vue de potentielles améliorations… Elle est juste une spectatrice comme les autres et apprécie le moment, se laisser l’occasion d’être charmée par ces beautés qui délivrent toute leur force et leur délicatesse en une seule et même chorégraphie.

Kora est la première à applaudir lorsque les artistes s’inclinent. Elle siffle entre ses doigts pour les acclamer, se lève même pour saluer leur performance. La Maison n’est qu’à son babillement et pourtant, c’est déjà en enfant autonome.

Elle retrouve rapidement sa place, et accueille chaleureusement Tori lorsqu’elle a fini son discours et s’approche des sirènes pour les remercier de leur présence. ”Chérie, nous sommes encore mieux accueillies que la Prêtresse mère ce soir !” raille la Diurne en passant un bras par dessus l’épaule de Tori, l’attirant dans une accolade. ”Ta Maison est sublime. Tes cadeaux aussi. Et tes trois petits trésors…” Elle se passe de commentaire, mais on lit dans son regard et son sourire que l’hybride est conquise. Ses mirettes divaguent vers la table des Joyaux auxquelles elle adresse un signe de la main.
Hélant un serveur qui passait auprès d’elles, Kora se saisit des verres qu’il distribuait et les tend un à un à ses amies. Elle garde le sien bien haut. ”Ce soir, nous fêtons ta réussite. Et nous remercions la dévotion de Luka et des autres d’avoir accepté de veiller sur le Soleil cette nuit.” Car il est bien rare que Kora n’y soit pas, et Yseult non plus. Dans ce genre de cas, c’est sur la Nocturne que repose toutes les responsabilités. Mais la boss a toute sa confiance, c’est celle qui a le plus d’ancienneté, après tout. ”A cette soirée mémorable !” Et puisqu'elle meurt de soif, elle boit son verre d'une traite.

Le grand jour était arrivé. Enfin.

L’attente avait été longue, il semblait à Dana qu’une éternité s’était passée depuis l’invitation de l’ouverture de la Maison Awoshan. La nocturne avait un profond respect pour Tori, qu’elle avait vu arriver au Soleil de Minuit et qui, au fil des semaines, avait pris sa place de sirène. Son talent était si particulier, son numéro de danse d’une beauté si ensorcelante ; les clients étaient subjugués. Plus âgée que la marchande d’art, l’illyrienne s’était révélée être une oreille délicate à laquelle toutes les confidences pouvaient être murmurées. Le Soleil de Minuit avait gagné une danseuse avec du talent le jour où Kora avait trouvé Tori mais Dana, avait gagné une amie. Pour l’occasion, la Volyn avait cherché une robe pendant des semaines et finalement, elle s’était tournée comme à son habitude auprès de Dashiell Ethelil. Le nombre de vêtements que la Volyn comptait dans sa garde-robe et qui portaient la signature du couturier devenait indécent. La nocturne, qui ne jetait jamais rien, devrait bientôt se résoudre à faire un tri et à se séparer de quelques belles pièces. Peut-être en proposerait-elle à ses amies, au lieu de les jeter. Sa robe de ce soir était d’un bleu nuit profond, le tissu épousant parfaitement chacune de ses courbes. Cintrée à la taille, la robe descendait ensuite avec une très légère fluidité. L’ensemble entier, mis à part sa poitrine et sa taille, était d’une transparence laissant peu de places à l’imagination.

En compagnie de quelques sirènes et amies, Dana s’avança dans les décors somptueux de la Maison Awoshan. C’est que Tori avait effectué un travail colossal. Si un jour la marchande d’art ouvrait un salon d’exposition, elle viendrait se tourner vers l’illyrienne pour quelques conseils de décoration. Un sourire se dessina sur les lèvres de la Volyn, en même temps qu’elle emboitait les pas de Kora, Yseult, Louve et quelques autres sirènes. Toutes n’avaient pas pu venir ce soir, le Soleil de Minuit devait être gardé et le spectacle devait se tenir. Mais Dana ne doutait pas qu’il était entre de bonnes mains dans celles de Luka et surtout, la majorité des sirènes les plus proches de Tori étaient venues. Les autres pourraient rattraper cette soirée dès l’ouverture de la Maison Awoshan. La nocturne s’installa à la table qu’on leur présentait, riant au commentaire de Kora qui tirait déjà sur le nœud de la petite boîte qu’une jeune fille venait de déposer face à chacune des sirènes. La marchande d’art s’empara de la sienne et elle en sortit un magnifique kimono d’un bleu nuit profond, brodé de quelques étoiles scintillantes, à l’image de sa robe qu’elle portait. « Les kimonos sont tous plus sublimes les uns que les autres ! » Tori avait pris soin de personnaliser chaque kimono pour qu’ils correspondent à la personnalité de chacune des sirènes.

L’attente ne fut pas longue, bien que le temps passait trop vite en compagnie de si proches amies. Trois artistes firent leur entrée sur scène, chacune possédant sa spécialité : la danse, le chant et la musique. Le spectacle était magnifique, tout aussi ensorcelant que le numéro de Tori au Soleil de Minuit. Dana reconnue immédiatement la signature de l’illyrienne et elle se laissa porter par l’ambiance magique. Déjà, il lui tardait de raconter toutes les merveilles de ce soir à Aslan lorsqu’elle rentrerait. Elle savait qu’on son compagnon l’attendrait et l’écouterait le sourire aux lèvres, la douceur dans les yeux. Dana était heureuse. Elle était heureuse pour le succès retentissant et méritant qui arriverait à Tori à l’ouverture, elle était heureuse de se trouver en compagnie de proches amies pour une soirée si détendue et si rare. C’est à présent son amie qu’elle observait sur la scène, puisqu’elle avait rejoint ses trois artistes au talent certains.

Le spectacle se termina et Dana applaudit fortement, poussant quelques hurlements d’encouragement. L’ambiance était si chaleureuse, les employés et tous ceux qui avaient participé à la construction de la Maison Awoshan semblaient impatients de l’ouverture et particulièrement heureux de se trouver dans cet endroit. Tori avait déjà réussi son pari. Le cœur de Dana se souleva de fierté de connaître une personne si déterminée et formidable. La Volyn écouta avec le sourire aux lèvres le discours de Kora, levant son verre en même temps que les autres sirènes. « A cette soirée mémorable ! » Répéta-t-elle en même temps que les autres. « Félicitations Tori, la maison est somptueuse, le spectacle était magique ! » Ajouta Dana rapidement, le sourire aux lèvres. « C’est un succès retentissant qui t’attend à l’ouverture. » Termina-t-elle en buvant à son tour dans son verre.